Pointu à Cassis

Pointu à Cassis
Pointu à Cassis (photo Toti)


« C'est ici un blog de bonne foi, lecteur.
Il t’avertit dès l’entrée que je ne m’y suis proposé aucune autre fin que culinaire et privée.
Je n’y ai aucune préoccupation de ton service ni de ma gloire.
Je l’ai consacré à la commodité particulière et gastronomique de mes parents et amis.
Ainsi, lecteur, je suis moi-même la matière culinaire de mon blog :
il n’est pas raisonnable que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain ».


dimanche 3 avril 2011

La Bottega del Gusto (VII) - L'artichaut (1)

La chronique
"La Bottega del Gusto"
est de retour
avec le printemps,
et sera consacrée pendant quelques messages,
à ce "seigneur au coeur tendre"
qu'est l'artichaut !

                                                   (Arcimboldo)

Aujourd'hui, le contenu du message
sera, comme il est d'usage,
historique, littéraire et artistique...
Commençons par un hommage à Pablo Neruda,
qui ne survécut que 15 jours au coup d'état
de Pinochet,
après avoir vu sa maison saccagée
et ses livres brûlés :
"La alcachofa
de tierno corazón
se vistió de guerrero,
erecta, construyó
una pequeña cúpula, ..."

"L'artichaut au cœur tendre s'est vêtu en guerrier, droit,
il a construit un petit dôme, il est resté imperméable sous ses écailles [...]
Une écaille après l'autre nous dévêtons le délice et mangeons
la pâte pacifique de son cœur vert."
Pablo Neruda, Odas Elementales (1954)


Cliquer sur les liens pour voir quelques peintures
consacrées aux artichauts :
http://www.galerie-com.com/galerie-unique.php?id=5462 Artichauts de Monge http://yvonneozouf.canalblog.com/archives/2010/01/04/16387534.html Artichauts tropicaux

On désigne sous le nom d'artichaut à la fois la plante entière
et sa partie comestible, l'inflorescence,
appelée aussi tête d'artichaut.

Le mot, apparu à la Renaissance, est emprunté
à son nom arabe الخرشف (al-karshuf)
(signifiant l'épine de la terre)
ou encore (ardi-shoki : la plante qui pointe)
par l'intermédiaire du lombard "articiocco".
La mythologie raconte que Jupiter tomba amoureux fou de Cynara, une très belle fille aux cheveux blond cendrés, qui le repoussa ; pour la châtier, il décida de la transformer en Cynara Scolymus: à savoir l'artichaut.

(L'apéritif Cynar bien connu en Italie)

On sait, grâce à des représentations graphiques anciennes, que les Egyptiens cultivaient déjà l’artichaut dans la haute Antiquité. Les Grecs et les Romains l’ont importé et s’en sont servis pour favoriser la digestion et pour traiter les troubles hépatiques et rénaux.

Il semble cependant que l'artichaut que nous connaissons ne soit apparu en Europe qu'à la fin du Moyen Âge, et qu'il s'agisse d'un chardon transformé par sélection par les horticulteurs (tout comme le cardon).

En 1532, on trouve la première mention de l'artichaut en Avignon, d'où il est diffusé dans le Comtat et le Languedoc. Cette fleur de chardon améliorée par les Arabes, a été apportée de Naples à Florence en 1466 par Filippo Strozzi. La tradition veut que son introduction en France soit liée au personnage de Catherine de Médicis, qui était très friande de fonds d'artichauts. La Florentine en apporta de son Italie natale lorsqu'elle épousa le futur roi de France, Henri II.
C'est grâce à sa gourmandise que l'artichaut a traversé la frontière transalpine. Déjà à l'âge de 14 ans, elle se moquait des recommandations des médecins de la cour des Médicis qui interdisaient la consommation de cet aphrodisiaque dont les conséquences pouvaient être terribles sur l'esprit.
(peinture flamande de Clata Peeters)

Les explorateurs français et espagnols l'importèrent en Amérique. Louis XIV aurait été également un grand consommateur d'artichauts.

En France, ce n'est qu'en 1810 que fut créé et développé, par un agronome de la région parisienne, le gros "Camus de Bretagne", devenu aujourd'hui l'artichaut le plus consommé en France, bien avant le Violet de Provence.

On le cultive aujourd'hui dans l'Ouest (Bretagne), dans le Sud-Est et dans la région parisienne.
Les deux principales variétés d'artichaut cueillies à l'automne et au printemps sont :
- le camus de Bretagne : gros, rond et lourd, avec un fond important. Il représente près de 80% de la production nationale.

- le violet de Provence (appelé aussi poivrade) qui peut se consommer cru quand il est jeune et petit (le foin est peu développé).
(Violets de Provence)

Enfin, pour terminer, si vous voulez repeindre
en couleur artichaut votre salon ou votre chambre,
voici un échantillon du nuancier :

Et je ne pourrais finir
sans donner deux recettes de salades à base d'artichauts :

Salade d’artichauts aux anchois
Ingrédients pour 2 personnes :
- 6 petits artichauts de printemps
- 1 boîte d’anchois à l’huile
- 1 citron
- 1 petit bouquet de persil ou de cerfeuil
- vinaigre balsamique
- huile d‘olive
- sel et poivre


Eplucher les artichauts afin de ne garder que le cœur et environ 2 à 3cm de feuilles, les couper en tranches très fines et les disposer dans une assiette creuse. Les arroser légèrement de jus de citron.
Pendant ce temps, laver les anchois afin que disparaisse
toute trace d’huile de leur préparation initiale.
Placer 2 filets d’anchois sur chaque artichaut.
Dans un bol, mettre quelques gouttes de vinaigre balsamique,
3 cuillerées à soupe d’huile d’olive, du sel et du poivre
puis remuer à l’aide d’une cuillère ou d’un fouet jusqu’à obtention d’une émulsion. Verser cette émulsion sur la préparation d’artichauts et d’anchois,
parsemer de persil ou de cerfeuil ciselé et servir aussitôt.


Salade d’artichauts aux copeaux de parmesan et à la menthe
Ingrédients pour 2 personnes :
- 6 petits artichauts de printemps
- 50g de parmesan
- 1 citron
- 1 petit bouquet de menthe
- vinaigre balsamique
- huile d‘olive, sel et poivre


Eplucher les artichauts afin de ne garder que le cœur et environ 2 à 3cm de feuilles, les couper en tranches très fines et les disposer dans une assiette creuse. Les arroser légèrement de jus de citron.
Couper le parmesan en copeaux.
Dans un bol, mettre quelques gouttes de vinaigre balsamique, 3 cuillerées à soupe d’huile d’olive, du sel et du poivre puis remuer à l’aide d’une cuillère ou d’un fouet jusqu’à obtention d’une émulsion.
Verser cette émulsion sur les artichauts, parsemer de feuilles de menthe ciselées, disposer les copeaux de parmesan et servir aussitôt.


Bon dimanche à tous !

3 commentaires:

Anne a dit…

J'aime beaucoup votre rubrique qui permet de découvrir les facettes les plus variées et passionnantes des légumes que vous présentez. C'est extrêmement agréable.
Je trouve que Jupiter en prenait bien à son aise avec la pauvre Cynara (et d'autres)...
J'aime bien le poème de Neruda. Prenons exemple sur l'artichaut face à l'adversité, tout en gardant un coeur tendre.
Vos recettes ont l'air délicieuses; merci pour votre publication, et très bon dimanche!
Anne

Gine a dit…

Je salive à la lecture de ces recettes ... il ne me reste plus qu'à trouver la matière première, assez rare dans ma région !

Anonyme a dit…

Je découvre votre blog tout-à-fait par hasard en cherchant de quoi agrémenter, dans l'humour, un texte concernant ma famille.
Votre article sur les artichauts m'en a appris énormément.
Ah ; il faut quand même que je vous en dise ... Pour cela, il me suffit de signer :
Alain Le Camus
(mais pas Prince de Bretagne)
ascendance en 1609 à Le Gouray (22)